Les marchés ethniques du Nord du Vietnam font la réputation du pays à échelle nationale comme à échelle internationale. Les nombreux peuples qui s’y côtoient, qui échangent leurs produits, qui partagent leurs savoirs faires, donnent à ces rassemblements un caractère de fête : les vêtements traditionnels des commerçantes h’mongs, la riche diversité des produits qui sont vendus, les bruits, les odeurs, les couleurs, font du marché ethnique au Vietnam un véritable spectacle de la vie quotidienne, à ne manquer sous aucun prétexte lors d’un voyage au Nord.
VACTOURS revient dans le présent article sur ces marchés des ethnies minoritaires du Vietnam que l’on retrouve principalement dans le Tonkin.
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Caractéristiques principales des marchés ethniques au Vietnam
Rappelons ici avec Maurice Durand et Pierre Huard les caractéristiques principales du marché au Vietnam, ethnique ou pas ethnique : « Le marché de campagne (cho), composé de quelques auvents de maçonnerie ou d’abris en paillotte n’est, en aucune façon, une installation permanente. Presque toujours établi en dehors des villages, à un carrefour de routes ou au bord d’un cours d’eau, il répond parfaitement aux exigences décentralisatrices de la structure communaliste du Nord Viêtnam. Les grosses affaires en riz, bois, huiles, bambous, feuilles de latanier, buffles, volailles, se traitent dans des marchés spéciaux ou à domicile. On ne trouve que de quoi assurer le modeste ravitaillement des familles rurales. Les marchandes sont en majorité. »[1]
De fait, l’on note trois traits distinctifs principaux :
- le marché est toujours temporaire ;
- il se trouve en dehors du village ;
- il est dominé par des femmes (commerçantes et consommatrices).
Huu Ngoc, dans l’un de ses fameux articles, revient sur ces marchés de montagne qui sont avant tout les marchés des ethnies minoritaires du pays, où se côtoient Thai, Tay, Hmong, Nung et Kinh, et ainsi de suite : « Les marchés de montagne sont de véritables kermesses, hauts en couleur, où les gens issus de différentes minorités ethniques se donnent rendez-vous pour s’amuser et pour se griser. »[2] Ce que l’on y retient : forte affluence, âpres mais cordiales négociations, cris, rires, chants. Au-delà du but principal de vendre ses produits, il y a la rencontre, l’échange. On se donne des nouvelles de telle ou telle vallée, de telle ou telle ville ; on se partage les bons tuyaux, les commérages ; en bref, bien plus intense qu’au café ou dans n’importe quelle rave-party un vendredi soir, on se sociabilise pour la semaine au moins !
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Les marchés ethniques du Vietnam : où les trouver
Au Nord de Hanoi, il existe de nombreuses provinces où l’on peut rencontrer les ethnies minoritaires à l’occasion de marchés : à Sapa, à Bac Ha, à Ha Giang, notamment.
À Sapa, il faut noter le Marché de l’Amour où Mong et Dao viennent rencontrer l’amour, et le village de Ta Phin à 15km de la ville où l’on achètera les brocarts les plus merveilleux.
À Bac Ha, on note principalement le marché quotidien ; le marché du dimanche qui est le plus important du district et qui rassemble les Hmong fleuris, les Tay, les Dao, les Nung, les Lolo, les Nhang, les Thai, les Phulao, les Thulao, les Chinois, les Kinh et bien d’autres ethnies minoritaires encore ; le marché à buffles de Can Câu sur la route qui relie Bac Ha à Si Ma Cai, réuni chaque samedi, tous les jours fériés et lors du Têt ; le marché de Côc Ly, chaque mardi, qui réunit les Hmong fleuris, les Dao noirs et les Nung ; le Marché de Sin Chieng, populaire pour ses légumes et ses viandes, tenu par les Hmong fleuris.
À Ha Giang, province la plus septentrionale du Vietnam, on dénombre environ 80 marchés ethniques, dans ses différents districts (Quan Ba, Yen Minh, Dong Van, Meo Vac, Hoang Su Phi).
En conclusion : Voyager au Vietnam, c’est partir à la rencontre de ses habitants, de ses 54 ethnies ; c’est découvrir leurs sociabilités, leurs coutumes, leurs façons de concevoir le monde ; c’est prendre le pouls d’une civilisation que l’on peut définir comme marchande, qui érige la négociation en art. Les marchés ethniques du Nord du Vietnam donnent l’occasion de voir le Vietnam autrement, un Vietnam plus authentique. On change alors de temporalité, d’époque, on replonge dans un passé qui est en fait toujours d’actualité.
Visiter les marchés des ethnies minoritaires est une expérience inoubliable lors d’un séjour au Vietnam.
[1] HUARD Pierre et DURAND Maurice, Connaissance du Viêt-Nam, EFEO, Hanoi, 1954 : p.103.