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À Van Phuc, le village de la soie…

« L’ancienne province de Hà Dông, aujourd’hui rattachée à Ha Tây, est un centre de la sériculture traditionnelle. Tout près de Van Phuc se trouve le canton de La (La est un vieux terme qui signifie soie) composé de sept villages, tous spécialisés dans le tissage de la soie. »[1] nous renseigne l’érudit Huu Ngoc. De fait, à une dizaine de kilomètres au sud-ouest de Hanoï, dans l’actuel district urbain de Hà Dông, se situe le vieux village de la soie Van Phuc qui attire chaque année de nombreux visiteurs.

VACTOURS revient dans le présent article sur les charmes de cet ancien village de métier aujourd’hui intégré dans la métropole de Hanoi.

 

Les origines mythiques du métier de tisserand à Hà Dông

« D’après la légende, Van Phuc aurait été le premier centre de l’artisanat séricicole de l’ancienne province de Hà Dông. Les tisserandes y vénèrent la Sainte Patronne La Thi Nga (VII-VIIIe siècles, au temps de la domination chinoise), consacrée Génie tutélaire du village. […] En son temps, on envoyait comme tribut à l’empereur de Chine toutes sortes de soie et de gaze. Van Phuc tissait aussi des brocarts pour les costumes d’apparat des rois et des marins du Vietnam. »[2] raconte le fin connaisseur des traditions vietnamiennes qu’est le centenaire Huu Ngoc, qui poursuit plus loin dans son article : « Dix Génies Patrons (Tiên su) de la soie et géomanciens passant devant le village de La Khê, y auraient remarqué une bande de terre évoquant la forme d’une navette ; ils s’y seraient établis et auraient enseigné le tissage à la population. »[3].

Dans toutes les sociétés traditionnelles, il est courant de donner aux savoir-faire une origine divine et supranaturelle, pour souligner le lien particulièrement très fort qui existe entre les hommes et le Ciel, ainsi que les forces de la vie.

 

Des siècles de savoir-faire

La pratique du métier de tisserand est attestée depuis des siècles, voire des millénaires. La soie était exportée en Chine et au Japon.

C’est cependant à l’aulne de la colonisation française et de son modèle capitaliste que l’industrie séricicole connaît; sur les deux plans quantitatif et qualitatif, son âge d’or : « À son apogée (début xxe siècle), plus de 200 métiers fonctionnaient à Vạn Phúc en permanence. »[4] nous renseignent Sylvie Fanchette et Nicholas Stedman, spécialistes des métiers traditionnels du Vietnam. Pour autant, cette production connaît une dégringolade à la suite de l’introduction du coton et de la soie artificielle en Indochine. Néanmoins, l’industrie finit par reprendre du « poil de la bête » sous l’impulsion de l’achat de machines Jacquard extrêmement performantes, qui font du village de Van Phuc un cas à part parmi les villages de métier traditionnels, fonctionnant traditionnellement en corporations clanico-familiales.

Sylvie Fanchette et Nicholas Stedman avancent trois éléments qui soulignent la particularité de Van Phuc sur le terrain économico-commercial; dans une société restée largement confucianiste :

  1. Le recours à une main d’œuvre salariée spécialisée ;
  2. L’achat de métiers Jacquard, du nom d’un industriel lyonnais spécialisé dans la soie, qui permettent de « programmer » les motifs ;
  3. Le monopole de l’industrie par des « filières commerciales développées » qui ont permis d’intensifier l’exportation de la soie[5].

Après la Révolution d’août 1945, du fait d’une collectivisation proactive qui contraste fortement avec le mode d’organisation économico-commercial de l’industrie séricicole; celle-ci finit par décliner et devrait attendre le Doi Moi (1986) pour connaître une véritable renaissance. « Après la Réunification, des artisans du village sont partis à Hồ Chí Minh Ville racheter des machines électriques françaises afin de moderniser leurs ateliers et d’accélérer le rythme de production » précisent Sylvie Fanchette et Nicholas Stedman.

 

  • Différents types de tissus

Aujourd’hui, la soie pure à 100% n’existe quasiment plus, pour des raisons de rentabilité notamment; ce qui fait du marché séricicole un marché pour le moins contaminé par l’esprit marchand. L’introduction de soies artificielles, l’achat de tissu en provenance de la Chine; le mélange des textiles, sont devenus des pratiques courantes pour rentabiliser au mieux son commerce. Il existe différents moyens de vérifier la qualité de la soie vendue; qui relèvent de la chimie (faire brûler un morceau de tissu, en tremper un dans une solution particulière, etc.); mais, depuis quelques années, les commerçants se sont mis à indiquer le taux de soie réelle contenu. Il demeure par ailleurs au village de Van Phuc des tisserands traditionnels qui continuent de faire de la soie pure comme jadis; mais leur prix est bien plus élevé que la soie de qualité moyenne.

En matière de motifs, vous serez largement servis : animaux classiques ou fantastiques, fleurs et arbres, etc., mis en relief par toutes les couleurs possibles.

 

  • Que voir d’autre à Van Phuc ?

En dehors de la pagode qui comporte des statues datant du XVIIè siècle (dynastie des Lê); de l’architecture du village durablement influencée par les activités artisanales qui s’y déroulent et de la maison communale qui chaque année rend hommage à la fondatrice du métier Madame La; Van Phuc est très connu pour avoir accueilli la résidence de Ho Chi Minh, depuis laquelle il écrivit le fameux appel de «  résistance nationale » du 19 décembre 1946.

 

[1] Huu Ngoc, « La soie traditionnelle de Hà Dông » in  A la découverte de la culture vietnamienne, Editions The Gioi, 2010 : p.410

[2] Idem

[3] Huu Ngoc, Op.Cit. : p.410-411

[4] FANCHETTE, Sylvie ; STEDMAN, Nicholas. Itinéraire 4. Villages du textile autour de Hà Ðông (Hà Tây) In : À la découverte des villages de métier au Vietnam : Dix itinéraires autour de Hà Nội [en ligne]. Marseille : IRD Éditions, 2009 (généré le 26 février 2020). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/irdeditions/6567>. ISBN : 9782709918497. DOI : 10.4000/books.irdeditions.6567.

[5] Idem

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